Apprendre à raconter des histoires amorales parce qu’à voix multiples, à conséquences en cascades, qui ne respectent pas la différence entre ce qui compte et ce qui peut être négligé, c’est peut-être apprendre à cultiver un type de savoir crucial s’il s’agit d’apprendre à vivre dans les ruines, là où tout idéalisme, tout attachement à des abstractions justifiant le pouvoir de « simplifier », l’économie de l’art d’observer, mènent au désastre.

Isabelle Stengers, préface de « Le champignon de la fin du monde », de Anna Lowenhaupt Tsing, les empêcheurs de penser en rond/la découverte, 2017.


En utilisant des documents et des archives, en convoquant des récits et des faits avérés, ma pratique se veut une relecture de récits constituant les marges de l’histoire. Elle interroge le rapport souvent non discuté d’une société à la valeur qu’elle donne aux choses.

J’ai d’abord été attentif aux processus formels et aux temporalités qui se manifestent par la persistance explicite dans l’œuvre plastique réalisée, des procédures qui ont conduit son élaboration (les lois de l’œuvre). Ensuite, le passage par une expérience politique d’écriture de textes juridiques (les lois au sens social) m’a beaucoup marqué. L’étrangeté de la position de l’artiste dans un environnement de travail politique a conduit à postériori à des travaux vidéographiques et à un texte (voir les vidéos « notes jaunes » et le texte « Le retour de l’artiste (dé)masqué ») qui tentent d’interroger cette position au sein de l’art.

Mon travail plastique s’est alors infléchi en une réflexion sur les situations de contraintes tant textuelles qu’imaginaires, en tentant de donner forme à ces impératifs et à ce qui les ruine. La manière dont le texte, notamment juridique, et ses montages fictionnels, conditionnent notre rapport au réel, à l’image et à l’art constitue l’axe principal de mes recherches. Investiguer un système de valeur en montrant la manière dont il se construit historiquement, dans une écologie de tensions parfois vives, puis donner à voir la manière dont l’échafaudage symbolique qui l’a permis est ensuite oublié est une orientation importante de ce travail.

Ce travail a été montré sous forme d’exposition à Bruxelles (ISELP, 2023; Espace intermédiaire, 2023; été 78, 2021), Vilnius, Lituanie, (Titanikas, 2021), Tartu, Estonie, (Kogo Gallery, 2020); Montréal (Occurrence, 2020); Saint-Omer (Espace 36, 2019); Bruxelles ( La lettre volée, 2018), Paris (2017), Charleroi (BPS22, 2016-17), Miami et Washington (2017) (Bienal de las fronteras, Institut Culturel de Mexico), Otttinies-Louvain-la-neuve (Biennale 8), Pékin (Namoc), Berlin (G.A.S-station), Bruxelles (de Markten), Kassel (Documentary Film and Video Festival).

Certains ont pris la forme d’un livre : classement diagonal / diagonal listing, Éditions la lettre volée, Bruxelles, 2018; Around Exit, Éditions La Part de l’œil, Bruxelles, 2014.

J’ai co-dirigé avec Jean Arnaud Document, fiction et droit en art contemporain paru aux PUP/ArBA en 2015, et coordonné le volume de La Part de l’Oeil n°30 consacré au cinéma.



Bruno Goosse is an artist and teacher at the Brussels Academy of Fine Arts.

Using documents and summoning stories and proven facts, his practice proposes a poetic and political rereading of certain sections of history by questioning the often undiscussed relationship of a society to value. 

Following the political experience of writing legal texts, which has left a deep impression on him, his plastic work deploys a reflection on situations of both textual and imaginary constraints, trying to give shape to these imperatives and to what ruins them. How the text, particularly legal, and its fictional montages condition our relationship to reality, image and art constitutes the main axis of his research. Investigating a value system by showing the way it is historically constructed, in the ecology of sometimes sharp tensions, and then showing how the symbolic scaffolding that made it possible is then forgotten is an important orientation of this work.

Often narrative, his practice develops in the form of video, installations of documents and publications. 

His work has been shown at Bruxelles (ISELP, 2023; Espace intermédiaire, 2023; été 78, 2021), Vilnius, Lituanie, (Titanikas, 2021), Tartu, Estonie, (Kogo Gallery, 2020); Montréal (Occurrence, 2020); Saint-Omer (Espace 36, 2019); Bruxelles ( La lettre volée, 2018), Paris (2017), Charleroi (BPS22, 2016-17), Miami et Washington (2017) (Bienal de las fronteras, Institut Culturel de Mexico), Otttinies-Louvain-la-neuve (Biennale 8), Pékin (Namoc), Berlin (G.A.S-station), Bruxelles (de Markten), Kassel (Documentary Film and Video Festival).

Some have taken the form of a book: diagonal ranking / diagonal listing, Editions la Lettre volée, Brussels, 2018; Around Exit, Editions La Part de l’Oeil, Brussels, 2014.


Voir aussi, sur mon travail, le texte de Danièle Méaux, paru dans la Nouvelle revue d’esthétique 2020/1 (n° 25) : L’artiste en historien amateur